La direction générale de l’Alimentation (DGAL) du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation pilote un système de surveillance de la contamination des productions alimentaires. Le système fait intervenir et interagir de nombreux acteurs. Son objectif principal est de vérifier la conformité sanitaire des productions et de suivre les niveaux de contamination susceptible de se retrouver dans les denrées alimentaires.
En 2015 et 2016, environ 60 000 prélèvements ont été effectués dans toutes les filières et aux différentes étapes de la chaîne alimentaire et environ 800 000 résultats d’analyses ont été produits. Comme les années précédentes, les niveaux de contamination des denrées et des aliments pour animaux, et les taux de non-conformité évalués au regard des seuils réglementaires sont faibles. Les données sont exploitées d’une part par les autorités pour la mise en place des mesures de gestion immédiate du risque et d’autre part par la communauté scientifique pour la réalisation de travaux de recherche. Elles permettent par ailleurs aux autorités de communiquer sur leurs actions.
Au vu des résultats de 2015 et de 2016, le système de surveillance mis en place a montré son efficacité, malgré les contraintes réglementaires et méthodologiques, grâce à une implication forte des différents acteurs et aux importants efforts humains et financiers consentis. Afin d’améliorer la qualité et la valorisation des données produites, une application informatique pilote, développée dans le cadre du projet « Qualiplan » portant dans un premier temps sur les plans relatifs aux résidus de médicaments vétérinaires, de facteurs de croissance et de pesticides, va permettre dès 2018 de mettre à disposition de la DGAL, des services déconcentrés et des laboratoires nationaux de référence (LNR) un ensemble d’indicateurs de qualité relatifs à la complétude et à la cohérence des données.
Numéro 89 Spécial Surveillance sanitaire des aliments
Editorial
Ce numéro est le second hors-série du bulletin épidémiologique dédié à la surveillance sanitaire des aliments (SSA). Il a été construit dans la droite ligne du numéro précédent et présente un bilan de l’organisation et des résultats de la surveillance des contaminants chimiques et biologiques de la chaîne alimentaire.
Un premier article présente un bilan général des plans de campagne de surveillance et de contrôle de la DGAl en 2015 et en 2016, puis des bilans spécifiques à la surveillance de certains contaminants chimiques ou biologiques de la chaîne alimentaire sont proposés. Le lecteur trouvera ainsi une présentation et analyse détaillées de la surveillance de certains contaminants environnementaux, comme les polluants organiques persistants ou les éléments traces métalliques dans les denrées alimentaires d’origine animale. La surveillance des intrants en élevage et en agriculture qui sont susceptibles d’être retrouvés à l’état de résidus dans les denrées fait également l’objet de plusieurs publications, parmi lesquelles les résidus de médicaments vétérinaires en filière porcine ou les pesticides dans le miel. Enfin, la surveillance des contaminants liés à un défaut de maîtrise des procédés à différents stades de la chaîne alimentaire, tels que les Salmonella ou les Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC), est le sujet d’articles dédiés.
Le format des articles a été majoritairement conservé, mais dans le cas où un dispositif de surveillance est inchangé, un format court de type « brève d’actualité » s’est substitué au format plus long de l’article, c’est le cas par exemple pour la surveillance de Trichinella dans les viandes d’animaux de boucherie.
Les travaux présentés sont le reflet d’un engagement des nombreux acteurs de la chaîne alimentaire en faveur de la sécurité sanitaire des aliments.
Le délai de parution de ces bilans ne peut nous satisfaire et nous avons engagé une modification de notre format de publication pour les années à venir. Le format spécial Sécurité Sanitaire des Aliments laissera la place à des articles publiés au fil de l’eau sur le site du bulletin épidémiologique, et le cas échéant, rassemblés dans des recueils de publications dédiés à des contaminants particuliers ou à des périodes ciblées de surveillance.
Les prochains bilans qui viendront ainsi nourrir le bulletin épidémiologique seront contemporains de la mise en place de la plateforme de surveillance de la chaîne alimentaire. Quelles que soient les modalités de parution de ces publications, la motivation qui anime l’équipe éditoriale spécialisée SSA du bulletin reste entière. Elle rejoint celle de l’équipe de coordination de cette plateforme, à savoir, contribuer au renforcement de l’articulation des activités de surveillance et du partage de l’information entre les filières et les secteurs qui composent cette chaîne alimentaire.
Le comité de rédaction vous souhaite une bonne lecture !
Au sommaire
Articles
Le système de surveillance des contaminants dans la chaîne alimentaire piloté par la DGAL : bilan de la campagne des plans de surveillance et de contrôle en 2015 et 2016
Surveillance des polluants organiques persistants dans les denrées alimentaires d’origine animale en 2015
En France, les denrées alimentaires sont régulièrement contrôlées dans le but de suivre les niveaux de contamination dans les productions nationales et importées. Cette surveillance permet de suivre des tendances et de s’assurer du respect des teneurs maximales imposées par la réglementation. Cet article s’intéresse au dispositif de surveillance piloté par la direction générale de l’alimentation (DGAL) en 2015, relatif aux polluants organiques persistants (POP) : dioxines et polychlorobiphényles (PCB), retardateurs de flammes bromés (RFB) et hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dans les denrées animales. Une mise en perspective par rapport aux résultats obtenus en 2014 est également proposée.
En 2015, plusieurs plans (aléatoires et/ou ciblés) ont été mis en oeuvre pour le suivi des teneurs en POP dans les denrées animales (principalement encadrées par le règlement CE n°1881/2006), soit 4 827 prélèvements dont une grande majorité concernant les PCB dioxin-like (DL) et dioxines (2 256 prélèvements) ainsi que les PCB non dioxine like (NDL) (2 264 prélèvements). Ce nombre de prélèvements est légèrement inférieur à celui de 2014 (4 932 prélèvements) mais, pour ces deux années, le constat est identique : les niveaux de contamination observés restent faibles et les non-conformités sont peu fréquentes (moins de 1 %). Les non-conformités observées portent exclusivement sur des échantillons de poisson (HAP, dioxines et PCB) ou de viande de gibier (dioxines et PCB).
Toutefois, il faut souligner la difficulté pour interpréter les résultats obtenus du fait des faibles nombres de prélèvements, des changements avérés ou potentiels dans les matrices prélevées (denrées de natures, de lieux d’origine, etc.), et de l’échantillonnage des prélèvements, qui selon les plans peut être aléatoire ou ciblé.
Surveillance des éléments traces métalliques dans les denrées alimentaires d’origine animale en 2015
La surveillance des éléments traces métalliques (ETM) dans les denrées alimentaires d’origine animale est assurée grâce à un dispositif qui permet de suivre les niveaux de contamination et le respect des limites maximales imposée par la réglementation (fixées par le règlement CE n°1881/2006). Cet article présente le dispositif de surveillance des ETM (plomb, cadmium, mercure) dans les denrées animales (produits de la pêche, animaux de boucherie, laits, gibiers, volailles, lapins et miels) mis en oeuvre en 2015 et 2014 par la direction générale de l’Alimentation.
En 2015, le suivi des teneurs en ETM dans les denrées animales a été mis en oeuvre à l’aide de plusieurs plans de surveillance et de contrôle (PSPC) au cours desquels 2 827 prélèvements ont été réalisés. Ce nombre de prélèvement est légèrement inférieur à celui de l’année 2014 (3 094 prélèvements), toutefois, tant en 2014 qu’en 2015, les niveaux de contamination observés restent globalement faibles et inférieurs aux seuils fixés, soit par la réglementation européenne (cas des limites maximales), soit au niveau national par la DGAL (cas des seuils d’alerte), pour l’ensemble des ETM suivis dans les PSPC. Sur les deux années, les dépassements observés ont concerné essentiellement le plomb et le cadmium dans la viande de gibier ainsi que le mercure dans les poissons de mer sauvage.
Enfin, il est à noter que certaines conclusions apportées dans ce rapport peuvent être sujets à caution étant donné le nombre parfois limité d’échantillons pour un couple « famille de denrée/famille de contaminant » donné. En 2015 comme en 2014, peu d’analyses ont notamment été réalisées sur le lait (de chèvre et de brebis), les gibiers d’élevage et le poisson sauvage d’eau douce.
Surveillance des phycotoxines dans les coquillages
Cet article présente le dispositif national de surveillance de trois groupes de biotoxines marines réglementées dans les coquillages. Ce dispositif est mis en oeuvre, d’une part au niveau de zones marines de production par le dispositif de surveillance REPHY-REPHYTOX de l’Ifremer et, d’autre part au stade de la distribution par le réseau des laboratoires agréés de la DGAL dans le cadre des plans de surveillance et des plans de contrôle mis en place chaque année. La réglementation européenne, la nature des phycotoxines recherchées et les méthodes analytiques sont présentées, ainsi que les modalités et la stratégie d’échantillonnage des plans de surveillance mis en oeuvre.
Les résultats des plans de surveillance de la DGAL obtenus pour les phycotoxines amnésiantes et lipophiles dans les gastéropodes, échinodermes, tuniciers en 2015 et les phycotoxines lipophiles dans les moules en 2016 sont exposés et discutés.
Bilan de surveillance de Trichinella spp chez les animaux de boucherie en 2016
Le dispositif de surveillance des Trichinella spp en place à l’abattage des animaux de boucherie a pour objectif d’identifier les carcasses contaminées afin d’éviter leur entrée dans la chaîne alimentaire. Les données de surveillance obtenues en 2016 indiquent l’absence de détection de contamination de carcasses de chevaux à l’issue des contrôles officiels. Concernant les porcs, aucun cas n’a été détecté en France continentale que ce soit en élevage hors-sol ou plein air. En revanche, le parasite désormais installé en Corse, a été détecté sur 4 porcs plein-air. Côté faune sauvage, un sanglier originaire d’un autre pays a été détecté positif pour Trichinella spiralis dans un parc de chasse dans l’est de la France, et un sanglier autochtone confirmé positif pour T. britovi en Ariège. Dans ce contexte, il est essentiel de respecter la réglementation en vigueur et de renforcer le contrôle des carcasses de sangliers.
Épidémiosurveillance de la cysticercose bovine en France : situation en 2016
Les données de 2010, 2015 et 2016 montrent une diminution faible même si statistiquement significative de la prévalence et de l’incidence de la cysticercose bovine en France. En 2016 la prévalence apparente était de 0,110 % [0,109-0,110], l’incidence apparente de 0,0081 % [0,0080-0,0083]. L’ajustement de ces données sur l’âge et le sexe n’a pas entraîné de modification importante de ces valeurs.
Dispositif de surveillance des résidus de médicaments vétérinaires dans la filière porcine en 2015 et 2016
Certaines substances chimiques introduites de manière volontaire (médicaments vétérinaires, additifs) ou frauduleuse (substances interdites) dans l’alimentation (eau de boisson, aliment) des porcs ou par voie injectable sont susceptibles d’être transférées vers les muscles et les abats. Le présent article a pour objectif de présenter un bilan des résultats des plans de contrôle français pour les résidus de médicaments vétérinaires et les substances interdites dans les muscles et abats de porc pour les années 2015 et 2016. Les résultats montrent que les muscles et abats de porc commercialisés sont en grande majorité exempts de substances chimiques réglementées. Depuis de nombreuses années, la filière porcine s’est mobilisée pour promouvoir un usage responsable des antibiotiques, ce qui s’est traduit par une diminution notable de l’exposition des porcs (- 42 %) aux antibiotiques depuis 2011.
Résultats du plan de surveillance et de contrôle des résidus de pesticides dans le miel en 2016
Les plans de surveillance et de contrôle de la contamination des denrées alimentaires d’origine animale sont mis en place par la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL) en application de la réglementation européenne. Pour la filière apicole, les prélèvements sont réalisés au stade de la production primaire chez les apiculteurs français. Les résidus de pesticides (médicaments vétérinaires et phytosanitaires) sont recherchés dans les miels par chromatographie en phase gazeuse et par chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem. Les résultats du plan 2016 ont montré des taux de contamination très faibles, inférieurs aux limites maximales en résidus.
Dispositif de surveillance des promoteurs de croissance pour les années 2015 et 2016
L’utilisation des promoteurs de croissance est interdite en élevage au sein de l’Union européenne depuis 1988. Afin de garantir au consommateur des denrées exemptes de résidus de ce type de substances, un dispositif européen de contrôle accompagne cette mesure, qui, en France, est organisé depuis 1988 dans le cadre des plans de surveillance et plans de contrôle (PSPC) mis en place par la Direction générale de l’alimentation. Le présent article rappelle le cadre réglementaire, les modalités de mise en oeuvre en termes de composés d’intérêt, d’espèces animales concernées, de matrices biologiques pertinentes et de stratégies analytiques adaptées. Plus particulièrement, cet article décrit le dispositif général de surveillance actualisé par les données issues des plans 2015 et 2016.
Surveillance des E. coli producteurs de shigatoxines (STEC) dans les viandes hachées de boeuf réfrigérées et surgelées mises sur le marché en France en 2016
Les Escherichia coli producteurs de Shiga Toxines (STEC) sont des bactéries zoonotiques d’origine alimentaire associées à des épidémies de grande envergure qui représentent un problème de santé publique de premier ordre. La viande hachée de boeuf contaminée par le contenu digestif des animaux porteurs et insuffisamment cuite reste une des principales sources de contamination de l’Homme. Le réservoir naturel des STEC est constitué le plus souvent par des animaux porteurs sains, et correspond plus particulièrement au tube digestif des ruminants. Bien qu’il n’existe aucun critère microbiologique réglementaire, une viande contenant une de ces souches est considérée comme « dangereuse ». Aussi, le plan de surveillance 2016 visait à établir le taux de contamination des viandes hachées de boeuf mises sur le marché en France par les souches STEC identifiées comme les plus à risque et, par conséquent à apprécier l’exposition du consommateur à ce danger ainsi que l’efficacité des mesures de prophylaxie mises en place par les professionnels.
Les résultats obtenus confirment que le taux de contamination des viandes hachées de boeuf est faible (0,3 % ; 3/876-IC95-[0,07-0,99%]) et du même ordre de grandeur que ceux obtenus précédemment, ce qui suggère que le risque d’exposition de l’Homme via la consommation de viande hachée de boeuf en France reste limité. Trois souches STEC O26:H11 ont été isolées dans les échantillons. Elles possédaient des marqueurs génétiques de virulence accrue. Trois des quatre souches AEEC (E. coli possédant le gène eae et non stx) isolées appartenaient au sérotype O26:H11 et une au sérotype O103:H2.
En 2017, la direction générale de l’Alimentation (DGAL) a poursuivi la surveillance de la contamination par les STEC des viandes hachées de boeuf surgelées au stade de la production.
Surveillance de la contamination des carcasses de porcs par Salmonella via la collecte des résultats des autocontrôles réglementaires réalisés par les opérateurs à l’abattoir en 2016
Les salmonelloses sont la première cause de toxi-infection alimentaire collective d’origine bactérienne en Europe. La viande de porc est une des sources associées aux cas humains. La Commission européenne a renforcé en 2014 la supervision de la maîtrise de cette contamination en filière porcine par l’autorité compétente. Dans ce cadre, un système de centralisation des autocontrôles réglementaires vis-à-vis de Salmonella dans les carcasses de porcs a été mis en place par la direction générale de l’Alimentation dans les abattoirs. Les résultats donnent une estimation du niveau moyen de la contamination des carcasses de porcs par Salmonella, à l’échelle nationale et dans chaque abattoir. La variabilité des taux de contamination entre les abattoirs peut être associée à des facteurs de risque qui pourraient faire l’objet d’études dédiées. Ces résultats sont transmis à l’Autorité européenne de sécurité des aliments chaque année pour répondre à un objectif communautaire de surveillance des salmonelles. Ils sont également utiles au niveau national pour sensibiliser les exploitants du secteur alimentaire.
Le réseau Salmonella, un dispositif de surveillance des salmonelles de la fourche à la fourchette : bilan 2016
Salmonella est depuis de nombreuses années un contaminant microbiologique majeur à l’origine d’épidémies d’origine alimentaires en France et en Europe. Dans ce contexte, le réseau Salmonella centralise, depuis 20 ans, des résultats de sérotypage de salmonelles isolées sur la chaîne alimentaire. Les laboratoires partenaires envoient des souches qui proviennent de toutes filières et de tous secteurs d’activités. Ces envois sont basés sur le volontariat. Cette surveillance événementielle complète les contrôles officiels réalisés chaque année. Ce volume massif de données collecté par l’Anses confirme les tendances et les émergences rapportées au niveau
européen. Toutes origines confondues, S. Typhimurium et ses variants monophasiques ainsi que S. Enteritidis demeurent majoritairement isolées (20 % des souches reçues).
L’optimisation de l’évaluation et de la gestion du risque de salmonellose chez l’Homme et l’animal implique la collecte de données de qualité, dans un pas de temps adapté. À la suite d’un processus d’évaluation de son fonctionnement, ce réseau a donc entamé en 2015 une profonde action de modernisation de ses outils analytiques mais également de pilotage, de partage et de communication de l’information pour mieux répondre aux besoins exprimés par l’ensemble des acteurs et utilisateurs de cette surveillance.